20/08/2007

Bang, Bang

Après une discussion très colorées entre deux journalistes et moi-même, je me suis fait la promesse de ne jamais plus parler de politique ou d'éthique avec des gens que je ne connaissais pas ou très peu. La raison en est bien simple: je partage rarement les passions de mes interlocuteurs concernant des sujets comme la dignité, la liberté, la guerre, la politique, etc.

Aujourd'hui je me suis levé comme à tout les autres matins; espresso, courte discussion avec personnages imaginaires (mes deux cactus, mon piment du chili et deux plantes en pots dont les nationalités m'échappent) et un survol rapide de ma très restreinte blogosphère. En gros, je plonge dans tout ce qui sert mon inspiration. D'habitude, ce sont les stéréotypes qui retiennent mon attention puisqu'ils me renvoient à moi-même et incitent souvent de l'amusement ou de l'introspection. Ce matin, c'est un commentaire concernant la façon de médatiser la guerre qui a mit le feu aux poudres et me fait trahir ma promesse.

J'ai remarqué qu'on s'étonnait souvent de la mort de nos soldats. Les raisons sont diverses; un soucis des familles, une sympathie pour les épouses, une étrange volonté d'adoucir les coins acérés de ce qui fait d'une guerre ce qu'elle est dans le but, peut-être, de susciter de la sympathie pour la violence quotidienne avec laquelle nous nous accordons tacitement.

J'ai su que mes réflexions sur la moralité ne ferait pas l'unanimité il y a un peu moins que 15 ans. À ce moment là, je suis finissant en lettre au CEGEP et mon univers se limite aux filles et aux petits plaisirs pervers, à l'alcool et à beaucoup de lecture. Je connais beaucoup d'étudiants mais je n'en côtoient que quelques uns qui m'apparaissent plus intéressants. Un de ceux là était particulier. Plus âgé, dans la trentaine, il avait quitté Montréal et ses mauvaises habitudes pour se refaire une santé et pour s'éloigner de son univers à lui. Je l'ai accueilli chez moi alors qu'il était ivre et d'un sentiment plus proche d'une colère qui gronde que de la tristesse. C'est que un des ses amis duquel l était très proche s'était fait violemment battre à la barre à clous. Il avait «fronté» plus qu'il ne pouvait remboursé, il avait vendu à son compte, on l'avait su, on l'avait corrigé...défiguré en fait. Mon invité n'était pas là pour se faire consoler, il était là pour me saluer car il partait. Il m'expliqua qu'il allait d'abord venger son ami, puis qu'il retournait à Joliette. Alors que je m'empressais d'essayer de le calmer, il me raconta qu'il n'y avait rien là, que c'était de même la vie et que de toute façon, tuer quelqu'un n'était pas la fin du monde: «l'osti de crosseur à Montréal, lui, il le méritait en tabarnac...pis il le savait en osti que c'était fini quand je l'ai pogné». Dites que c'est un meurtrier, un tueur sanguinaire du genre qui se cache sous le lit ou dans le garde-robe, que c'est de sa faute si on dort avec une veilleuse, whatever.
Dans mon cas, ce qui m'a intrigué, c'est l'absence pas mal complète de crainte ou même de jugement à son égard. C'est difficile à décrire sans être un peu cliché ou un peu cheezy, mais j'avais l'impression que j'étais devant la vie elle-même.

Cette impression là a été assez puissante pour tourner mon univers en dérision. Mon monde est devenu burlesque, difforme. On m'invitait à être autonome en m'offrant une carte de crédit, on m'exhortais à être authentique en me forçant à la conformité. Je devais être différent, mais pas au point d'attirer l'attention. On disait que j'étais libre, mais je devais me soumettre à ma nationalité ou à la bureaucratie. «L'amour, l'amitié, la justice, l'égalité et la paix existe», me disait-on, mais tout ce qu'on me montrait n'était que violence, perversion, injustice, etc.

J'avais 21 ans et un assassin venait de me prouver qu'on m'avait menti.

Plus tard, une pute a fait de même. Vînt ensuite le suicide d'un de mes clients que j'aimais bien, ma mère, forte et inspirante, en burn-out. Et la guerre, toujours la guerre.

C'est un peu désolant. Quand quelqu'un décide d'enlever son nez de clown parce qu'il se sent assez fort pour affronter tout ça, on dit qu'elle est lourde, cynique ou pire encore, malade.

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