08/08/2007

Wakeast, créatine et bikinis ou Bacchus à la Ferme.



Les révolutionnaires qu'étaient nos parents ont créés une première génération de monstres. Teintés par l'esprit d'ouverture et par les promesses de plaisirs infinis qu'offre un sens moral flou mais tordu, la génération X, moi, est damnée à n'être que l'incarnation d'un «programme transitoire» entre l'espoir et la négation.

Entre un projet d'émancipation et un rêve d'autonomie, la génération X aura souhaité la paix et la sagesse.

À la place, elle a eu un coup de pelle et un bain de réalité.

Or, ceux et celles qui nous suivent hériteront d'un monde fini mais indifférent. On est de l'équipe des maudits chanceux qui metteront toutes leurs vies à se choisir une équipe: entre espoir et fatalisme, entre amour et cynisme, entre art et design, entre ville et campagne, entre foi et doute, entre Vérité et opinions. On est en transit, pour nous le monde est une zone grise avec des frontières de rêves en ruines et d'envies impossibles. Nous n'avons pas grand chose à déclarer si ce n'est qu'un «en tout cas...» expiré et porté par un soupir.

Alors imaginez cet état d'esprit. Ensuite imaginez un Honda Civic blanc, rouillé, avec seulement un speaker côté passager et du country dans le plafond. C'est moi qui conduit et je viens à peine d'arriver au Lac St-Joseph pour la plus grosse compétition de Wakeboard de la province: le Wakeast. C'est que, voyez-vous, je suis le Dj pour la journée.

Le destin d'un DJ peut s'avérer tragique. Il tient la valeur de la journée entre ses mains. Au 3/4 vedette locale instantanée et au 1/4 politicien avec un mandat clair de plaire à tout le monde, le DJ fait la pluie et le beau temps d'un party. La nature de son travail en fait quelqu'un qui doit observer et analyser les besoins de sa clientèle. Son existence est toutefois fragile puisque ses responsabilités s'étendent à tout ce qui n'est pas de sa faute.
Je m'explique. La qualité du son est sa responsabilité, si on perd les basses, tout les yeux se tournent vers le dj pour une explication. Dans un marriage (chose que je déteste du fond de mon âme), c'est la faute au dj si les matantes ne dansent pas, c'est aussi de la faute au dj si la mariée n'a pas SA toune. Dans un bar, c'est la faute au dj si les clients ne dansent pas. Or, si les clients ne dansent pas, les gars et les filles se mélangent mal. C'est ce qui explique pourquoi la première mission du DJ est de faire danser les filles. Bref, la qualité du party dépend du dj à qui on épargne heureusement la responsabilité d'une mauvaise météo.

Au Wakeast, les premières choses qui sautent aux yeux sont, dans l'ordre : une très longue ligne de chars montés, avec mags chromé, petite peinture cute, aileron et exhaust à réaction. Leurs propriétaires viennent bons deuxièmes. À chaque auto son tapon, son zouf ou son gigon. Tous sur la créatine, bien gonflés et avec la volonté affichée d'avoir l'air virile tout en étant épilés. Lunettes de soleil et bling-bling, des québécois-latino ben sur les pines dont les existences crient le besoin d'attention des 3èmes places: Les chicks.

Ah, seigneur. Les poules...

Il y avait une rumeur qui courait sur la plage. Le représentant de la ferme avait organisé un concours de bikinis auxquels toutes les poules étaient conviées. La reine du poulailler allait être consacrée par la foudre des olympiens rassemblés sous la banière Billabong, près de l'arena Coors Light à la montagne bleue toujours froide.
Dans le coin droit: Magalie au maillot ocre, 34B bien sonné, mèche en prime et petit cul bombé. Les Olympiens, aux ordres du centurion Meneurdefoulus, s'écrient d'une seule voix: « Racing, Racing!». Derrière elle, le regard affolé telle un biche sur la grande route de la vie, une fille que l'histoire oubliera, considère un moment le commentaire de la foule avec un peu de dédain. Puis, s'élançant sur le stage comme pour attraper un train par la cheminée, traverse le catwalk au son assuré de «Suck This, Bitch» des N.W.A. Le dj en feu, allume la masse de taureaux en leur administrant des hits de gangsta rap. Aujourd'hui les bacchantes sont de la partie! Les hommes hurlent de plaisir et leurs cris déchirent la quiétude de la plage et l'hymen familial qui y règne d'habitude. Des mères outrées, cachent les yeux de leurs rejetons tandis que des pères abandonnent leurs responsabilités, séduit par l'appel du combat. Aujourd'hui, eux-aussi auront leur érections! Dans le coin gauche, Annye (!?). bikini blanc, peau brune et cheveux blonds-blancs. 36B, pas tout à fait un cul racing mais une chute de rein hollywoodienne qui aurait réveiller Ron Jeremy. Habile au poteau, elle connaît les hommes et leurs présente, presque une offrande, ses fesses, les épaules plus basses que ses reins et leurs envoyant un petit bec sucré. Tout son corps est un télégraphe :«C'Est qui le chanceux?» et elle termine en X sur le stage, crucifiée par le voyeurisme de la meute de laquelle éructe un grognement qui présage une veille météo. Satisfaite et éclaboussée d'hormones mâle, elle se détourne dans les applaudissments et les cris. Nous avons une gagnante. La perdante, vaincue, monte sur la scène pour la première fois. Stéphanie, 32 ans, la plus vieille des participantes. Elle a un bikini brun et sa peau est plutôt pâle. Elle ne possède pas l'unicité du tan de ses adversaires qui ont pu jouirent tout l'hiver du salon de bronzage. Sa peau n'a pas non plus le fini d'une fille de 20 ans. Elle a une petite bedaine, de bonnes épaules, une poitrine un peu inégale. Elle bouge maladroitement sur une musique qu'elle ne connaît pas, elle se fout complètement du prix de 500$. Stéphanie n'a qu'un désir: être belle à 32 ans et se le faire dire. Les mâles veulent Annye (?!), 21 ans et fraîche. Stéphanie a perdu d'avance, elle le sait, mais c'est une femme. Elle va survivre, même il n'y a que le dj pour l'avoir remarqué.

J'ai été là pendant 7 heures au total. Je savais que le monde était une drôle de place, mais là...j'ai eux plus de fun qu'au zoo de Granby. Ça fait drôle d'avoir la certitude qu'il y a une sorte de personne, la majorité du monde en fait, avec qui je ne pourrai jamais m'entendre sur quoi que ce soit d'autre que le cul d'une fille quelconque dont on se fout éperdûment sauf si...sauf si...c'est une poule qui veut se faire baiser. En dehors de ça, c'est le plus gros rassemblement d'épais que j'aurai vu de toute ma courte carrière de Dj.

Optimiste moi? pfft.


2 commentaires:

Marieve Gagné a dit…

on est vraiment faite quand on est vieille comme Stéphanie...
voilà pourquoi je me tiens si loin des concours de bikinis et surtout de ces juges sur la créatine!!!


j'ai lu ;)

Bacchus a dit…

Pis? Pas pire Nerd hein? :)

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